Lectures fondatrices et absence de fioritures chez Charles JULIET par Jean-Pierre SIMEON
11/05/2016
Juliet aime passionnément la lecture, les livres. Boulimique même. On sait cependant que c'est à vingt ans passés, dans la bibliothèque de l'Ecole de Santé Militaire de Lyon, qu'il rencontre réellement la littérature. Il fouille, découvre, pêle-mêle, des dizaines d'écrivains. Une avidité qui n'a rien à voir avec un quelconque besoin de divertissement. C'est tout le contraire. La soif inquiète -ontologique- qui le dévore a tôt fait de choisir : l'âge d'homme de Michel Leiris, les lettres de Van Gogh... " Non tous les livres, ceux qui agrandissent la vie, poussent à creuser davantage."
On lit les livres qu'on mérite, ou plutôt qu'on voudrait mériter, dont on rêve d'être à la hauteur. A vingt-six ans, Juliet découvre la poésie contemporaine. Par quelle miraculeuse intuition s'attache-t-il pour commencer à Blas de Otero, dans l'anthologie parue chez Seghers à l'automne 59 ? Le titre bien sûr pour ce jeune homme engoncé dans ses ombres et ses doutes, est un appel : Parler Clair. J'ai sous les yeux l'exemplaire personnel de Juliet, acquis en 1960 et je lis, surligné au stylo bleu, à la règle, dans l'avant-propos de Claude Couffon, ceci : "Otero est sans doute celui qui a été le plus loin dans le chemin de la précision, de la rigueur de l'expression poétique. Chez lui aucune fioriture. Chaque mot a sa valeur propre, sa nécessité, son sens, souvent même son double-sens. Chaque vers est un élément efficace, net et tranchant comme la voix exigeante qui le dicte" En Juliet dans le texte, si l'on ose dire.
Jean-Pierre SIMEON | La conquête dans l'obscur | jeanmichelplace/poésie | Collection dirigée par Zéno Bianu | 2003 | p.28